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Tigré : les montagnes de Gueralta

 

Ces quatre jours de randonnée sont assez homogènes et il est plus facile de les aborder par thèmes et événements plutôt que jours par jours.

Toute cette partie du Tigré est composée de larges plaines très plates surmontées de montagnes du Gheralta. Si les plaines sont à environ 2000 mètres d'altitude, les montagnes les dominent de moins de 1000 mètres. Par endroit, on a l'impression d'être à Monument Vallée, à la différence que les plaines en bas sont cultivées et avec des arbres au lieu du vaste désert du Névada. Les roches en grès rouge sont superbes au soleil couchant et durant les quatre jours dans ce massif on ne s'en lassera à aucun moment. Ce ne sont pas des collines mais des grandes parois à pic de 200 à 300 mètres. Vue d'en bas, c'est très joli. Vue d'en haut, c'est impressionnant et cela nous arrivera le quatrième jour en montant par un chemin invraisemblable à Maryam Korkor et à Daniel Korkor. C'est le seul point de vue qui m'ait donné le vertige et pourtant, durant bien d'autres parties de ce périple, on a souvent dominé les plaines. tigré
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Comme c'est du grès la plupart du temps, on n'a pas de souci de chemin glissant ou qui s'éboule et le grès a de superbes couleurs qui s'étagent du jaune au rouge en passant par le gris, le rose-rouge étant le plus fréquent. Seule exception notable, le deuxième jour : on a eu droit pendant deux heures à devoir progresser dans des rochers d'un mètre de haut environ complètement déchiquetés, très coupants et râpeux envahis d'épineux. La belle vie, quoi ! D'autant plus qu'avant, on a fait toute la montée dans les arbustes, les épineux, et les herbes piquantes. Mais la partie sur la crête de la montagne efface tout cela : nous sommes sur un plateau incliné avec un à pic de 400 mètres qui domine toute la région. tigré
tigré Au niveau de la vue, on voit très au loin, les deux premiers jours avec un ciel assez chargé et comme un brouillard au loin, les deux derniers jours avec une vision claire des montagnes à l'horizon.
Plusieurs fois, nous avons été survolés par des vautours dont le vol lent et majestueux est un spectacle en soi.

La dernière randonnée dans le Tigré est un peu différente des précédentes. On doit monter aux églises de Maryam Korkor et Daniel Korkor. C'est un parcours comme je les aime. On commence par une montée dans une faille étroite et très raide sur de gros rochers pendant environ une demie heure. Ensuite, après une petite pause vers l'ancienne église, on doit à moitié escalader une paroi de grès très pentue avant d'arriver à un chemin qui surplombe la vallée en contrebas de près de 1000 mètres. Après à nouveau un passage scabreux d'escalade, on arrive à la première église qu'on visite. Le prêtre qui nous y accueille est un semi ermite, c'est à dire qu'il ne respecte pas complètement les exigences des vrais ermites : aucun contact physique (y compris recevoir directement de main à main quelque chose), ni visuel (il faut baisser les yeux devant lui). Les vrais ermites creusent aussi leur tombe durant leur vie et s'y installe quand ils sont malades afin que s'il meurt, personne ne les touche : il suffit de sceller la tombe !
Pour la deuxième église, le chemin est très particulier : il s'agit d'une vire ( corniche) d'environ un mètre cinquante de large qui n'a bien évidemment aucun garde fou ou main courante pour un à pic totalement vertical de plus de 300 mètres. C'est le seul endroit de toutes les vacances où j'aurai eu une sensation de vertige surtout qu'en face, c'est la plaine sur des kilomètres.
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la montée à Myriam korkor

à droite : l'à-pic vers la vallée, vu de la vire
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Fresques d'église dans le Tigré

à droite : le prêtre en charge de l'église
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tigré Curieusement, j'ai trouvé que la descente était plus facile que la montée alors que d'habitude, c'est l'inverse.
Si dans ces montagnes du Ghéralta on voit peu d'animaux sauvages, on a cependant eu la chance de voir ... une grosse marmotte ! On ne sait pas si s'en était réellement une mais cela y ressemblait beaucoup, en avait le comportement et le guide nous a bien certifié que s'en était une.
Les grandes plaines sont plutôt cultivées, essentiellement en céréales, sorgho, teffe (une petite herbe qui produit des graines minuscules), blé pour la plus grande partie. On verra aussi quelques rares plants de tomates. Les champs sont assez petits, quelques dizaines de mètres de côté tout au plus et très caillouteux. La terre semble très sableuse et en général assez pauvre. Nous sommes en fin de saison des récoltes et la plupart des champs sont en terre. Comme clôture ou séparation, ce sont des petits chemins en terre ou en sable avec souvent de petits cactus. Quelques chemins sont bordés par des haies de grands cactus à raquette, voire aussi d'euphorbes de plusieurs mètres de haut. Certaines parcelles ne sont pas cultivées mais en herbe et buissons avec quelques arbres où viennent manger les animaux domestiques. Ces derniers sont omniprésents, gardés la plupart du temps par les enfants : zébus, chèvres, quelques moutons et ânes et parfois dromadaires. On doit souvent laisser passer un ou plusieurs ânes lourdement chargés, de paille la plupart du temps, parfois de sacs de grains. Mais ici, les animaux ne transportent jamais personne.

Le nombre de zébus et de chèvres est vraiment incroyable. On en voit jamais de grands troupeaux, tout au plus quatre ou cinq quand ils sont dans leur champ, une dizaine en ville ou dans une petite agglomération. Chaque famille a souvent plusieurs animaux et plusieurs sortes en même temps. Du coup, on voit un ou deux enfants garder à la fois deux zébus, trois biquettes et un âne par exemple. Heureusement, on est en saison sèche. Les crottes et les bouses sèchent vite et c'est tout sauf un problème sur les chemins que nous empruntons. L'avantage des sols secs et poussiéreux, c'est que les animaux sont très propres, au contraire des vaches en France, souvent pleines de terre. On verra aussi très peu de mouches, sauf dans une maison dont je reparlerai plus tard.
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un grand sycomore
(la personne devant le tronc montre l'échelle !)
Dans les champs et les maisons, on ne verra aucune mécanisation. Le battage se fait à la main ou avec trois zébus qui piétinent la paille, la récolte à la faucille (en principe dentelée mais tout le monde ne peut s'offrir ce "luxe"), le labourage avec l'antique araire à bœuf - ici le zébu. Cette agriculture manuelle ne suffit pas à nourrir la population. Pour cela, il faudrait augmenter les rendements, donc utiliser des engrais et des machines. Mais alors, il n'y aurait plus besoin d'une telle main d'œuvre et le remède serait alors peut être pire que le mal.
Le problème majeur reste l'eau. Si des maisons ont de l'eau, beaucoup d'éthiopiens doivent parcourir cinq à sept kilomètres pour puiser vingt ou trente litres qu'ils ramèneront sur un âne s'ils ont la chance d'en posséder un, sur le dos sinon.
Deux fois nous aurons un aperçu des conditions de vie de la plupart des éthiopiens dans les campagnes. A chaque fois, notre guide nous fait inviter à prendre le café chez l'habitant. Ceux-ci nous accueillent avec une grande générosité alors qu'eux-mêmes n'ont rien et survivent difficilement. La première fois, c'est l'aînée des filles qui nous le prépare. La maison est un carré d'environ quinze mètres sur quinze dont la plus grande partie est composée de la courette intérieure où viennent se réfugier tous les animaux pour la nuit. Pour en revenir à la maison, la partie habitable est toute petite (environ quatre mètres sur sept) avec pour seule "meuble" le lit des parents et les couchettes des cinq enfants le long des murs. Nul table, nulle chaise et aucun éclairage, sachant qu'on est sous l'équateur ou presque, avec douze heures de nuit ! Quelle vie ! tigré
tigré Dans la courette, vu que les animaux y passent la nuit, beaucoup de bouses et de crottes. Mais ce n'est rien à côté de la deuxième maison où nous aurons droit au café. Là, c'est carrément une couche de plusieurs centimètres qui tapisse la courette avec les enfants pleins de mouches qui y vivent. Pour que l'on puisse s'assoire, la femme ramasse une grosse bouse fraîche avec une petite pelle et pousse ... avec la main ! Juste après, elle fera le café et lavera les tasses avec l'eau qui vient dont ne sait où...
Non seulement nous aurons droit au café mais elle nous partagera aussi une grande galette de pain et ce sera le meilleur pain qu'on aura consommé en Ethiopie. Tout autant que nous sommes, nous avons envie de donner beaucoup plus que ce que le guide lui octroie. A plusieurs reprises, il nous expliquera que trop donner ou donner aux enfants revient à en faire des mendiants qui préféreront attendre les touristes plutôt que d'aller à l'école ou travailler.
Dans la plupart des maisons il y a un ou deux chiens souvent un peu faméliques et qui aboient dès qu'ils nous voient. Ils ne sont à peu près jamais agressifs. Leur rôle, c'est la nuit, comme nous le découvrirons la première nuit sous la tente : personne ne pourra dormir à cause des aboiements tout proche du campement et incessants. Ils ont pour but d'éloigner les hyènes qu'on entendra aussi, bien qu'on ait su qu'après coup qu'elle était leur cri. Le matin, tout le monde aura envie de réveiller les chiens qui commencent à se reposer de leur nuit de garde. Les deux autres nuits sous tente dans le Tigré, on n'aura plus de chiens proche et donc une nuit plus calme, sachant qu'il y a toujours eu quelqu'un pour veiller à notre sécurité. tigré
tigré Question sécurité, on a une fois de plus - et ce ne sera pas la dernière - la vérification que strictement rien n'est fait pour la protection des gens à tout niveau. En passant près d'un moulin, le guide nous propose de visiter l'installation locale. Dans un grand hangar en bois, les clients font la queue avec leurs sacs de grains amenés le plus souvent à dos d'ânes. La machine est en deux parties : d'un coté le moteur à essence, de l'autre le broyeur, sans cache de protection pour le chargeur. Entre les deux, une courroie à l'air libre ... et beaucoup de poussière de grains par terre dans laquelle on marche. Cette absence de mesure de protection se retrouvera tout au long de notre périple y compris, mais dans une moindre mesure, dans les hôtels ou les lodges récents.
Si à Lalibela on avait déjà vu beaucoup d'enfants, là, lors de notre randonnée dans le massif du Gheralta on en verra encore beaucoup. C'est parfois drôle, comme d'être suivi par une trentaine d'enfants qui sortent de l'école le soir et nous accompagnent le long de la route, souvent touchant quand on en voit de très jeunes s'occuper des troupeaux ou travailler dans les champs, quelques fois agaçant quand ils veulent absolument nous vendre des babioles. En ville ou dans les campagnes, on peut ainsi mesurer le poids de la démographie galopante et qui est en train de poser un défi gigantesques à cette jeune Afrique. tigré
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Si l'eucalyptus est roi sur la plus grande partie des hauts plateaux, ce n'est pas le cas ici. Il y a une certaine variété et de loin en loin, d'énormes sycomores étalent leur majesté au dessus de la plaine. Comme c'est la fin des récoltes, le paysage est parsemé de grosses meules.

En Ethiopie, on est presque à l'Equateur. Cela veut dire que le soleil se couche tôt (vers six heures) et que la nuit tombe très vite. Il faut donc rejoindre le campement avant la fin de l'après-midi sous peine de s'installer de nuit sous la tente. Cela veut aussi dire que le dîner, servi tôt, se fait de nuit et aux lampes frontales complétées par une lampe plus puissante. Les repas sont très bons, bien meilleurs qu'aux hôtels et restaurants. Contrairement à la Jordanie, il n'y a pas de veillée et on rentre tôt sous la tente, ce dont je suis assez content : même si je dors mal, cela permet de se reposer, d'autant plus que la plupart du temps il faut se lever tôt pour bien profiter des journées.

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tigré    les paysages du Tigré